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LES CLASSIQUES - 1 -2: L'ARIOSTE ET LE ROLAND FURIEUX, trois auteurs et deux illustratrices

2 - Autour du ROLAND FURIEUX
avec Luigi DAL CIN
et
Pia VALENTINIS

 

 

LES CLASSIQUES - 1 -2: L'ARIOSTE ET LE ROLAND FURIEUX, trois auteurs et deux illustratrices

        Et les plus jeunes? Pourront-ils approcher les aventures de ORLANDO FURIOSO? Oui, dès 7 ans, grâce à l'initiative prise par les musées de FERRARE - ville natale de Ludovico ARIOSTO - au Palazzo dei Diamanti.  ( Version française de Wikipedia si vous tapez "Palais des Diamants à Ferrare" sur Google )

        C'était en 2016, la ville célébrait les 500 ans de la première édition de L'ORLANDO FURIOSO, par une somptueuse exposition : "Cosa vedeva Ariosto quando chiudeva gli occhi" - " Ce que voyait Arioste lorsqu'il fermait les yeux", du 24 septembre 2016 au 8 janvier 2017. Mais n'allez peut-être pas tout de suite vous promener sur le site de l'expo, attendez pour le visiter, car vous allez  plonger dans un monde de tableaux, de vidéos, d'informations (hélas, uniquement en italien, mais une info  en français ici) d'où vous ne sortirez pas de sitôt.

Occupons-nous d'abord du livre.

        Car l'initiative s'adressa aussi aux plus jeunes - et, comme d'habitude, aux adultes qui les entourent. Et c'est ainsi que Luigi DAL CIN pour le texte et Pia VALENTINIS pour les illustrations créèrent un "petit livre" magique. Un grand "petit livre" magique.

A commencer par son titre:

ORLANDO PAZZO / NEL MAGICO PALAZZO

 Il y a Roland qui est "pazzo",  "fou" (fou furieux) dans un palais enchanté, "màgico". Dans LE palais màgico..

Est-ce Palazzo dei Diamanti? Pour le visiteur de l'expo, oui, sans aucun doute.

Pour notre Roland, non (quoique, indirectement... mais cela nous emmènerait trop loin). L'idée féconde de Luigi Dal Cin (conteur émérite que nous avons déjà rencontré, tapez son nom dans la petite fenêtre Recherche, en haut à droite de cet écran, vous reverrez les pages de Lectures Italiennes qui parlent de lui; idem pour Pia Valentinis), son idée, donc, est de partir de l'épisode du palais enchanté du magicien Atlant - nous sommes, dans le poème, au chant XII.  Et il l'explique au lecteur, dans le huitain très "ariostesque" qui ouvre le livre:

 

 

"Dans le palais  enchanté d'Atlant, chacun poursuit son plus grand désir.......

...............

... et ce qui se passe dans cette somptueuse merveille, au fond, nous ressemble un peu".

        Tous les mots sont importants, et tous sont immédiatement compréhensibles par un jeune lecteur (est-il utile de préciser, une fois pour toutes, en ces temps de polémique sur l'"écriture inclusive", que pour moi, "un jeune lecteur" est un jeune humain, garçon ou fille, qui lit...). Chaque mot: "Insegue" - poursuit; "desiderio" - désir; "sontuosa"- somptueuse; "meraviglia" - merveille (et émerveillement); "rassomiglia" - ressemble; "ci rassomiglia" - nous ressemble.

        Le Roland Furieux est le poème de la poursuite: au centre Angelica qui fuit, et tous ses soupirants qui la poursuivent. Leurs trajectoires se croisent et s'écartent, créant une géographie toute particulière, sur laquelle se greffent d'autres histoires, d'autres poursuites, d'autres désirs.

Et comme ils vont tous se croiser dans le palais enchanté, Luigi Dal Cin en profite pour nous les présenter et nous raconter leur histoire particulière. Ainsi nous saurons d'où vient Roland, avec son épée Durandal ("Durlindana") et son cheval  Bride d'or ("Brigliadoro").  Qui est Angélique, la belle princesse indifférente. Nous rencontrerons la guerrière chrétienne à la blanche armure, Bradamante, et le vaillant guerrier païen Roger ("Ruggiero")  - qui a aussi délivré Angélique d'un monstre marin et s'est "perdu" sur l'île de la magicienne Alcine.Et aussi le jeune Astolphe à la recherche de son destrier... Tous arrivés "par hasard" dans ce château ensorcelé, tous persuadés que ce qu'ils  cherchent y est, alors que ce n'est qu'un labyrinthe d'illusions dont ils sont prisonniers.

 

        A l'intérieur de ce château, comme dans tout le poème, les enchanteurs et les magiciennes ne manquent pas, avec leurs protégés et leurs ennemis. Ni les objets magiques: l'anneau d'Angélique, qui rend invisible quand on le met en bouche, et révèle les enchantements; le livre d'Astolphe, sorte de manuel des sortilèges et de leurs antidotes; son cor au son "orrìbile e terrificante" qui permet la dissolution du palais enchanté.

        En somme, Dal Cin, comme Calvino, a fait un choix d'épisodes déterminants - comment la froide Angélique tombe éperdument amoureuse du jeune Médor; comment le malheureux Roland,

errant à sa poursuite, apprend cet amour et en devient littéralement fou furieux, réduit à l'état de force brute.

Comment ses amis, les paladins de l'empereur Charlemagne (Re Carlo) envoient Astolphe sur son hippogriphe au paradis terrestre d'où, accompagné de l'évangéliste Jean, sur un char de feu, ils se rendent sur la lune, dans la vallée "delle cose perdute", l'équivalent des "objets trouvés", en quelque sorte. Ils y trouvent, parmi une multitude de choses, la raison de Roland enfermée dans une petite fiole.

        En quarante pages, Dal Cin donne à ses lecteurs une image fidèle du texte de l'Arioste.

Fidèle aussi par le style qu'il adopte.  Pour reprendre ses propres mots, "une prose poétique pleine de rimes, d'assonances, de répétitions, d'enjambements", toutes techniques utilisées par le poète de Ferrare. "Orlando pazzo nel magico palazzo" est un vrai régal à lire à voix haute, c'est déjà perceptible dans le titre.

 

        Vous avez vu, tout en lisant ces lignes, les reproductions des illustrations de Pia VALENTINIS.  Qu'elle soit ici chaleureusement remerciée de nous les avoir prêtées. Est-il besoin de souligner l'empathie qui existe entre l'illustratrice, l'histoire et la version qu'en donne Dal Cin?

Dès le dessin de couverture, l'extravagant plumet doré du paladin donne le mouvement de la course. Quitte à être, quelques pages plus loin, comme une réplique de la blonde chevelure d'une Angélique pimbêche

Roland et les paladins en armure ont quelque chose à la fois des chevaliers de la tapisserie de  Bayeux, et des marionettes siciliennes de l'Opera dei Pupi. Ils se déplacent dans un décor de théâtre. Et les regards échangés par les protagonistes (quelques traits de noir) valent tous les discours.

Cela n'empêche pas Valentinis, le cas échéant, de faire appel à un écho des escaliers de M.C. Escher, parfaite image du labyrinthe de l'illusion, ou aux "diamants" du palais éponyme de Ferrare.

J'ai déjà souligné le huitain qui ouvre le livre, auquel correspond celui qui le referme:

E ora, amico,che il racconto qui è finito,       Et maintenant, ami, que le récit finit ici

che, finalmente, la guerra si è conclusa,      que, finalement, la guerre est terminée

che cosa resta? ..........                                que reste-t-il?..........

......                                                                 ..............

     Resta Ariosto, la giocosa sua regìa,                 Il reste l'Arioste, la gaîté de sa réalisation,

restano ancora amore, sogno, fantasìa...    il reste encore l'amour, le rêve, l'imagination...

          Ne croyez-vous pas que quiconque aura vu, lu, feuilleté, entendu cette version de l'histoire du Roland Furieux ne l'oubliera plus et aura envie, avec le temps, de s'en approcher d'avantage? J'en suis, quant à moi, persuadée.

  Mais il me reste à vous faire un aveu: raisonnablement, je n'aurais pas dû vous signaler ce livre. Pour la raison - triste raison - qu'il est, semble-t-il, aujourd'hui épuisé. Pourtant, en m'adressant à la librairie par correspondance qui diffuse à l'étranger les publications de l'éditeur Fondazione Ferrara Arte, Libro Co j'ai réussi à en avoir deux exemplaires. C'est le miracle réalisé par donatella@libroco.it  qui a cherché, et trouvé. Vous pouvez essayer... Il vous en coûtera 16 € plus le port.

 

       Cette dernière lecture de 2017, je vous la dédie, à toutes et tous, afin que
(restino) ancora amore, sogno, fantasia....
Belle et bonne année 2018!

 

 

 

 

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