N'oublions pas que Giusi Quarenghi, outre écrire, s'est aussi occupée de dessins animés, de scénarios, de cinéma. Il y a de l'allégresse dans le rythme qu'elle donne, en pratiquement deux pages par histoire, à ses récits. Seule exception, Les Musiciens de la Ville de Brême ont droit à cinq pages.C'est peut-être l'histoire du dimanche. Mais le rythme n'en est pas ralenti pour autant.
L'incipit est sur le même schéma,pour chaque conte. L'auteure remplace le traditionnel "Il était une fois" par un "Il y a très longtemps, quand..." et chaque fois une autre trouvaille: - quand le ciel, peut-être, était plus grand... - quand la mer, peut-être, était plus salée... - quand on ne savait pas encore que deux et deux font quatre...." Ce qui crée une attente pour le conte suivant.
Les actions sont rapides, les dialogues fondamentaux et savoureux, les assonances n'y manquent pas, si bien que c'est un vrai régal de lire ces contes à haute voix.
Mon préféré est Le renard et les oies. Le titre déjà donne le ton :Oche Qua-Qua-Qua
L'éditeur ne m'en voudra pas, si, pour vous allécher, j'en cite le début: "Tanto tanto tempo fa, quando ancora non si sapeva che due più due fa quattro, un bel branco di oche bianche, morbide e tonde se ne stava in un gran prato di eba trifoglina a prendere il sole" - " Il y a très très longtemps, quand on ne savait pas encore que deux et deux font quatre, un beau troupeau d'oies blanches, moelleuses et rondelettes se faisait bronzer dans un grand pré de trèfle et de sainfoin.". N'est-ce pas plus joli de dire "erba trifoglina" que le prosaïque "trifoglio"?
Arrive le renard, affamé comme d'habitude, qui annonce en deux phrases assonantes son intention de les manger ("Sono proprio fortunata, oggi mi faccio una bella mangiata" - le renard, en italien, est un nom féminin). Réaction des oies: "Le oche la guardarono e poi si guardarono tra loro, con l'aria molto molto preoccupata. Qualcuna allargò le ali, qualcuna si mise a correre, qualcuna cominciò a beccare la terra, qualcuna girò la testa dall'altra parte. E una prese addirittura la parola:..." - Les oies le regardèrent, puis se regardèrent d'un air très très inquiet. Qui ouvrit ses ailes, qui se mit à courir, qui commença à picorer par terre, qui regarda ailleurs. Et il y en eut même une qui prit la parole...".
Et c'est de là que vient le salut. Et vous saurez pourquoi les oies font "-quoi-quoi-quoi" encore aujourd'hui. Et vous l'entendrez.
"Et le renard? A u fait, il est passé où le renard?"
Fin de l'histoire, matérialisée chaque fois par un trait plein, alors que, sur la page précédente, c'était un pointillé.