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TAPPARI-2 : INFANZIA DI UN FOTOGRAFO

          Tàppari-2, pour permettre, aux adultes ou aux adolescents,  d'approfondir  : on peut regarder d'autres de ses albums, réalisés avec Chiara Carminati. Ou encore lire certains de ses textes. Vous vous rappelez sans doute celui sur les "hippovoyants", écrit à l'occasion de l'exposition de Gek Tessaro, présenté ici il y a un peu plus d'un an...

          En 2021 est paru, aux éditions TOPIPITTORI, un petit livre dans lequel, à sa façon,  Tàppari raconte son enfance, de photographe, comme le dit le titre: Infanzia di un fotografo.

          À vrai dire, il ne "raconte" pas au sens courant du terme.  En 95 pages et 172 paragraphes, entrecoupés d'une quarantaine de photos (quand même...), il évoque des épisodes de son enfance qui peuvent avoir trait à sa vocation de photographe-à-l’œil-voleur illustré par le précédent article.

          Il le fait en paragraphes plus ou moins longs qu'il numérote, en passant de l'un à l'autre par enchaînement de mots - technique que nous connaissons bien avec la fameuse comptine " J'en ai marre / marabout / bout d'ficelle etc..." et que les poètes utilisent aussi, parlant de "vers fraternisés" ... Chez Tappari, le procédé n'est pas aussi rigoureux, mais l'idée est là, et il dessine ainsi un cheminement serpentin qui mène à des étapes parfois surprenantes, mais revenant toujours à l’œil, à l'image, à la perception, bref à la photo, au cours de son enfance et un peu plus loin.

          Appréciez, au passage, sur la couverture du livre ci-dessous reproduite, comme l'appareil de photo dessiné par Guido SCARABOTTOLO (rencontré dans les pages de Lectures Italiennes en décembre 2020) a quelque chose d'un visage humain avec ses deux yeux, et l'objectif-nez-bouche...

 

          Le paragraphe 01, reproduit sur la couverture, donne le ton. C'est un aphorisme devenu culte depuis que ... Sergio Leone l'a mis dans la bouche du Bon qui l'adresse au Truand au milieu d'un cimetière désert - où se cache le trésor... - dans le film éponyme: " ... Tu vois, le monde se divise en deux catégories... etc..."   Il a été repris maintes fois, et Tappari se l'approprie de façon plaisante : "01 Le monde se divise en deux catégories de personnes : ceux qui divisent le monde en deux catégories de personnes et ceux qui ne le font pas"  (p.5).

                                                                                                                                                                        

 

 

Pour  dédramatiser, peut-être,  un texte autobiographique qui n'est jamais anodin ("... moi-même je me sens divisé en deux..." idem).

 

      Cet itinéraire nous porte à la rencontre de personnes (les numéros vous indiquent certains paragraphes, mais pas tous ceux qui parlent du sujet) : sa mère (03 à 07), qui lui raconte des histoires très tôt, et veut pour lui deux saints protecteurs plutôt qu’un; son père (31) qui lui met entre les mains son premier appareil de photo (87); une incroyable nonna-grand-mère qui, toujours ébouriffée, disparaît au moment d'une photo de famille, non pour se recoiffer, mais pour "se préparer pour la photo... en [se] mettant du parfum" (170)  ; le nonno-grand-père, sa montre-oignon, et ses talents de siffleur (50 à 52). Et puis des enseignants: depuis les religieuses de la maternelle (18) jusqu'aux maestre, les maîtresses de l'école primaire (21 à 24),  aux profs du collège, de toute sorte, les "positifs" et les "négatifs", celle d'italien, celui d'arts plastiques ou d'éducation physique, ou de musique... Mais aussi un oculiste (120-121), un gardien de musée, un agent des RG ("la DIGOS")...on a envie d'ajouter "... et un raton laveur."... l'atmosphère est un peu à la Prévert.

         Tappari nous fait aussi voyager dans toute sorte de villes italiennes, et de pays du monde, et de citoyens particuliers de ces pays, pour des anecdotes qui illustrent son idée de la photographie, on pourrait parler de philosophie, qui se met en place chez lui dès l'enfance, et qui fait réfléchir, mine de rien, la lectrice comme le lecteur. Et, fatalement, au paragraphe 127, page 70, on arrive au mot magique: "Pare...ido...quoi?" demande une de ses petites amies, tout comme nous nous le demandons.                -" Paréidolie... un terme compliqué pour définir quelque chose de simple". Si vous tapez ce terme sur un moteur de recherche, vous trouverez en effet beaucoup d'articles, mais vous n'en avez pas besoin, car c'est une activité que nous pratiquons toutes et tous quand nous voyons une tête d'oiseau dans un morceau de bois ou un visage humain à l'arrière d'un réveil-matin. C'est l’œil-voleur de Massimiliano.  Notre auteur "observe le monde avec une innocence qui n'est pas de l'ingénuité, mais une suspension du jugement : il regarde les objets, les inventions de l'humain et le monde naturel avec un regard frais, mobile, que n'appesantissent pas les lieux communs" - ce sont les mots de Elena Dolcini, dans un portrait sensible et réfléchi de Tappari   que vous pouvez lire sur le blog des Topipittori, ici,  et qui s'intitule rien moins que MASSIMILIANO TAPPARI. ENFANT À PLEIN TEMPS.   (Avril 2023)

           Il est difficile de donner une idée fidèle de Infanzia di un fotografo, à la fois de sa légèreté et de sa profondeur. Il faut le lire... Il entre parfaitement dans la définition de la collection dans laquelle il est publié, que l'on découvre en quatrième de couverture:" I TOPI IMMAGINARI, Les souris imaginaires. Une collection de récits brefs, voire très brefs, épisodes, souvenirs, visions, lectures et rencontres fondamentales pour la construction de son imaginaire et sa propre formation."

 

          Alors, avant de quitter Massimiliano TAPPARI pour des exercices de paréidolie, asseyons-nous sur une de ces deux chaises aériennes, en face de l'auteur, et écoutons-le nous dire sa conclusion, le paragraphe 172 du livre, à la page 95 :

          "Nous avons une vie entière derrière nous. Devant aussi, bien sûr. En nous vivent les âges les plus disparates. Ce qui nous est arrivé continue à nous parler et à nous définir. Tout revient. C’est ce que nous disent les aborigènes australiens qui, lorsqu’ils lancent leur boomerang, font très attention à ce qu’il ne vienne pas les frapper dans la nuque. Chacun de nous a vécu une enfance exceptionnelle. Il y en a qui s’en sont rendu compte, d’autres pas. Ceux qui ont eu des enfants ont apprécié la chance de la revivre. Aujourd’hui, je suis un photographe heureux et comblé. Suis-je célèbre ? Je dirais que non, mais de temps en temps quelqu’un m’appelle pour me dire qu’il a vu quelque chose que j’aurais pu photographier, moi, et cette idée de revivre dans le regard des gens, proches ou lointains, est mon vrai moteur. Quand je suis au lit et que je cherche de bonnes raisons pour me lever, ma pensée file tout de suite vers la moka et son café et les petits gâteaux sur leur rayon. Le rayon dit « du régime-minceur ».  Mais, si je réfléchis bien, ce qui me pousse vraiment à abandonner la douce tiédeur des couvertures pour retrouver la position verticale, c’est essentiellement la curiosité. Tant que je sortirai le matin, mon appareil de photo en bandoulière, ça voudra dire que, tout compte fait, il y a encore une bonne raison pour affronter le monde et se laisser surprendre par la vie. "                                                                                                                                                                  

INFANZIA DI UN FOTOGRAFO 

de Massimiliano TAPPARI

Editions   TOPIPITTORI   2021                                                                                                                      COLLECTION : I TOPI IMMAGINARI

PAGES: 92            PRIX: 12€

ISBN: 9788833700830

DROITS DISPONIBLES:  OUI

 

 

 

 

Un grand merci à l'éditeur pour les images ici reproduites

 

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